La pluie tombait sur Broome aujourd'hui. Fallait bien que ça arrive le soleil avait brillé non stop depuis trois semaines et la chaleur avait été insoutenables ces derniers jours. Un peu de fraîcheur m'allait bien, même si cela avait le don de me rendre particulièrement nostalgique. La pluie, elle adorait ça avant. Avant qu'elle ne soit morte. Et maintenant il ne me restait plus qu'à admirer cet étrange paysage pour me consoler péniblement de la plus grosse perte de ma bien. Cela remontait à sept ans mais même si le temps effaçait peu à peu son souvenir, la douleur elle était toujours présente.
Heureusement, suite à cette terrible épreuve, j'avais été extrêmement entouré. Mes amis ne m'avait pas lâché d'une semelle, n'hésitant pas à squatter mon appartement pour être sur que je ne saute pas de la fenêtre ou que je ne me pende pas à l'un des poutres de bois... Je souriais en pensent à eux Pit, Eden et Jo. Je n'avais jamais eu ni frère ni sœurs mais à eux seuls ils étaient ma famille. Celle pour qui j'étais capable de tout, y compris de survivre. Car même si ils ne le savent pas c'est grâce à eux que j'ai remonté la pente.

Mon portable vibra dans ma poche et je tirais une bouffée de ma cigarette avant de regarder le message que je venais de recevoir. Eden. Qu'est ce qu'elle voulait encore ? J'espérai que ce n'était pas un autre plan foireux pour me mettre en couple avec Isis sans quoi, ça allait chauffer pour elle. « Rendez vous au bar habituel à 16h ! ». Je levais les yeux au ciel avant de glisser mon Iphone dans ma poche sans prendre le temps de lui répondre. Elle savait bien que j'allais venir lui tenir compagnie.
Les heures passèrent alors que je bossais sur un dossier pour une grosse boite quand je remarquais qu'il était déjà 15h30. Laissant tomber le boulot pour aujourd'hui, j'attrapais ma veste en cuir rapidement avant de descende au bar attendre la belle blonde pétillante. Elle saurait me faire sourire en cette triste journée et c'est ce qui m'importait.

Le bar était presque vide, seuls quelques aventureux avaient eu le courage de se jeter sous  des trombes d'eau pour boire un verre. Je repérai bien vite une table vide et décidait de m'y asseoir en attendant mon amie. Mais quelques minutes plus tard ce ne fut pas elle qui franchit le seuil du café. Non cette femme là était brune et elle semblait me poursuivre comme la peste ces derniers temps. Je plongeais brusquement dans la carte, soudain passionné par la diversité du choix mais elle s'approcha tout de même de ma table à mon grand désespoir. Entre grognement et soupirements, je levais les yeux à contre cœur avant de lui balancer. « Mais qu'est ce que tu fou là ? Me dis pas que c'est un plan pourri que t'as organisé avec Eden ?! Nan mais celle là je te jure.. Je la croise, je l'étripe. ». Ce qu'elle pouvait être agaçante quand elle s'y mettait ! Moi qui voulait me changer les idées voilà que je me retrouvais face à LA fille avec qui je ne voulais pas parler. La seule que je ne pouvais pas voir. C'était bien ma veine. Journée de merde.

Putain... C'était quoi ce plan foireux encore... J'allais massacrer Eden. Non franchement, je l'adorai cette fille, mais cette façon de vouloir me caser depuis le décès d'Elyne c'était chiant. Vraiment chiant. Pire ça m'emmerdait, et en faisant ça, j'étais sur qu'elle se rendait même pas compte qu'elle me faisait repenser au pire moment de ma vie. La mort de celle que je considérai encore comme la femme de ma vie m'avait brisé, réduit en miette. Depuis sept ans, je n'étais que l'ombre de moi même et même si je savais que les intentions d'Eden me concernant était louable, je me refusais de les accepter. Je ne voulais personne d'autre qu'Elyne dans ma vie. C'était avec elle que j'avais rêvé et construit ma vie... Personne ne pourrait jamais changer cela, pas même la bimbo la plus futée de la terre.

Isis. Putain je pouvais pas la voir, je ne savais pas pourquoi mais chaque fois que je croisais son regard, une rage folle s'emparait de moi. J'étais incapable d'avoir une discussion amicale avec elle, alors que tout mes autres potes l'adoraient moi je m'enfermais dans ma bulle chaque fois qu'elle se pointait à nos sorties. Et ça me faisait chier. Ouais vraiment, parce que j'avais cette sensation débile qu'elle m'éclipsait aux yeux des autres, avec ses jolies yeux et son sourire ravageur.
Sans même la saluer, je commençais déjà à lui aboyer dessus comme un chien enragé. C'était plus fort que pour une raison que je ne comprenais pas encore. Mais ça l'a fit pas dégager pour autant. Qu'est ce que je pouvais bien faire pour qu'elle me foute la paix ?
" Je t'arrête tout de suite, j'avais rendez-vous avec Eden mais apparemment elle nous à tendu un piège.". Je grommelais dans ma barbe. Nan mais celle là, elle en manquait pas une et le pire c'est que dès qu'elle me ferait ses petits yeux de biches, je serai incapable de l'engueuler. Bordel ce qu'elle pouvait m'énerver. Je m'attendais à ce qu'elle parte par la suite puisqu'il était évident qu'on s'était fait baisé, mais elle finit par s'installer en face de moi.

" Maintenant tu veux bien m'expliquer ce que je t'ai fais pour que tu m'agresse comme ça à chaque fois qu'on se croise ?! J'arrive à m'entendre avec toutes les personnes du groupe sauf toi ! Alors maintenant tu m'expliques. Balance tout ce que tu as a balancé au lieu de te comporter en véritable crétin à chaque fois. Soit un homme vas y, j'ai tout mon temps et je suis prête à tout entendre. ". Elle avait parlé doucement, sans élever la voix, alors que moi je bouillonnais. Je comprenais pas les raisons de ma colère, ni pourquoi elle se dirigeait toujours vers elle, mais ce dont j'étais certains c'était que je ne voulais pas discuter avec elle....  «  Soit un homme »... C'était de la provocation.
« J'ai pas de compte à rendre à ce que je sache. Si t'as tête me revient pas c'est pas mon problème. ». Avec ses mains jointes et son tailleur blanc, elle avait l'allure de la parfaite secrétaire. La canon de secrétaire.. Quoi j'ai pensé qu'elle était canon ? Non non c'était pas possible, je pouvais pas penser ça. Je délirais totalement. Elle était comme elle était et rien d'autre point. C'était Isis, et je ne lui ferai jamais une place dans ma vie point final. « Je continuerai de me comporter en crétin que ça te plaise ou non. J'en ai rien à foutre. Sur ce, je me casse. ». Et sans attendre, la moindre réponse de sa part, je me levais et me dirigeai vers la porte du café, donnant sur la rue.

Journée de merde. Note à moi même ne plus JAMAIS, JAMAIS accepté de rejoindre Eden quand ce n'est pas en présence de toute la bande. Cette blonde avait vraiment l'esprit hyper tordu. Fallait toujours qu'elle trouve une excuse débile pour que je me retrouve seul à seul avec Isis, comme si je ne montrais pas assez clairement que je n'en avais strictement rien à faire de cette nana. Elle voulait quoi à la fin ? Que je montre vraiment le méchant Nolan ? Au final dans cette histoire, je n'étais pas le seul à faire les frais des idées stupides de la potiche blonde, puisqu'Isis se retrouvait tout aussi impuissante que moi. Ouais sauf que voilà, je n'en avais rien à faire. A mes yeux, j'étais l'unique victime de ce qui me semblait être un complot.
J'étais parfaitement conscient que tout cela partait d'une bonne intention, qu'Eden souhaitait simplement me revoir aussi heureux que par le passé, peut être que le Nolan que j'étais autrefois lui manquait. J'en savais rien à vrai dire. J'étais juste persuadé que c'était pas une raison pour m'arranger des plans avec une nana que je pouvais à peine supporter !

Et là voilà qui s'était installée face à moi ! Bordel elle allait pas me lâcher un peu ? J'avais rien à lui dire, même si elle visiblement n'en avait pas fini avec moi. Des explications. Voilà ce qu'elle attendait. Elle pouvait courir la petite, j'avais rien à lui dire moi. Je l'aimais pas, fallait pas chercher plus loin. Je lui fis d'ailleurs  bien comprendre avant de me lever pour quitter le bar. Je n'avais plus rien à faire ici de toute façon. C'était avec ma tête des mauvais jours, que je m'apprêtais à regagner la rue, toujours aspergée par la pluie diluvienne qui s'abattait sur Broome, lorsqu'une furie brune s'interposa entre moi et la sortie. Isis encore. Elle s'était positionnée de façon à me barrer le passage, de façon à ne pas me laisser quitter l'établissement. Putain elle manquait pas de culot ! Elle était sérieuse là ?
" Je te félicite, tes arguments sont très convainquant. Puisque tu décide de te comporter en crétin comme tu confirme si bien, je ne vois pas pourquoi je n'en ferais pas autant. Tant que tu n'acceptera pas de me faire face je resterais là à bloquer les entrées et les sorties. Personnellement j'ai tout mon temps.  ". Elle était sacrément têtue. Presque autant que moi, j'étais pas dans la merde tiens ! Elle planta son regard droit dans le mien et je pus y voir sa détermination. Pourquoi elle ne me foutait tout simplement pas la paix à la fin ? Quelle importance que je me comporte comme le premier des cons avec elle ? Elle n'avait qu'à m'ignorer j'en m'en porterais tout aussi bien et elle aussi !

« Tu m'emmerdes Isis, je t'ai déjà tout ce que j'avais à dire. », lachais je brusquement. J'avais tout simplement pas envie de parler. Des flash de notre première rencontre me revinrent en tête, et brutalement, je compris pourquoi je pouvais pas la voir. Parce que je l'avais rencontré de la même manière qu'Elyne, j'avais construit un mur entre nous, pour ne pas le revoir chaque fois que je la regardais. C'était aussi bête que ça. « Quoique qui fasse que je me comporte comme un con avec toi..., crois moi tu veux pas le savoir. », finissais je par avouer, espérant que cela suffirait pour qu'elle me lâche les baskets. Je rêvais peut être, mais je pouvais toujours tenter le coup. « Maintenant dégages, tu te rends ridicule et tu m'empêches de sortir. ». Et si tu bouges pas ton cul d'ici les cinq prochaines minutes, c'est moi qui te ferait bouger... Tu peux me faire confiance là dessus.

J'en revenais pas de la réaction d'Isis. J'aurai pris le temps d'apprendre à la connaître, j'aurai certainement vu le coup venir, mais la rien. Puisque je me comportais comme le dernier des cons avec elle, j'avais loupé ma chance. Mais ce n'était pas ma faute, dès que je la voyais, la colère me prenait. J'avais juste envie de déverser toute ma rage, toute ma frustration, toute ma douleur sur elle. Et tout ça, parce qu'elle avait eu le malheur de me rentrer dedans en voiture. Tout ça parce qu'elle était entrée dans ma vie comme Elyne l'avait fait par le passé. Tout ça parce qu'elle me balançait sans le vouloir mon passé et ma souffrance en pleine gueule. Et parce que je souffrais j'avais décidé inconsciemment de lui faire payer.
Au fond de moi, je le reconnaissais c'était parfaitement ridicule. Mais c'était comme ça et ce n'était sans doute pas prêt de changer. Je n'étais habituellement pas du genre têtu, mais j'étais sacrément rancunier. Et bien qu'Isis ne m'ait en soi rien fait, je ne pouvais pas m'empêcher de lui en vouloir pour me renvoyer l'image de ma femme bien aimée en pleine figure.

Nous étions donc à présent postés comme deux abrutis devant la sortie du bar. Elle me bloquant le passage, moi cherchant une issue. Je ne voulais pas l'affronter car, c'était tout simplement me résoudre à lui raconter mon histoire, à revivre ma peine et je n'étais certainement pas d'humeur pour une moment de nostalgie. Même si ma douleur était encore la seule chose qui me raccrochait à Elyne, je ne tenais pas à la partager avec Isis. Aussi je décidais de tenter une approche différente pour qu'elle me lâche enfin. Lui en donner un peu, en espérant que ça lui suffise. " Donc tu l'admets ?! Tu te comporte comme un crétin. Pourquoi ? Parce que j'ai faillis te créer un accident et endommager ta jolie voiture ? Je me suis déjà excusée à ce propos. C'est pas possible, il y a quelque chose d'autre. Dès notre rencontre tu as fait ça. Quoi ma tête ne te revient pas juste pour ça ? ". Je haussais un sourcil surpris qu'elle s'énerve ainsi. Elle paraissait plutôt calme comme nana aux premiers coups d’œil, et on ne pensait pas qu'elle cachait un tel caractère. Je n'eus même pas le temps de répondre quoique ce soit qu'elle enchainait déjà. " Pour information, j'en ai rien à faire de me ridiculiser. Le plus ridicule de nous deux ici ce n'est pas moi. Et tu va faire quoi dis moi si je ne me pousse pas ? Hein ? ". J'avais déjà mon idée sur le sujet. Elle devait pas être bien lourde. La soulever et la faire sortir avec moi, ce ne serait pas bien compliqué. Mais je n'eus encore pas l'occasion de lui faire part de mon idée, qu'elle reprit. "C'est bon je m'en vais ". Et elle me laissa planté là abasourdi. Je ne la suivais plus pour le coup ! Même si c'était bien ma veine qu'elle se casse, je la suivais pas. Un coup elle voulait m'arracher des info, l'autre coup, elle se cassait sans me demander mon reste.

Je restais debout comme un con, face à la porte qui venait de me claquer au nez. J'étais sous le choc, et pourtant, en général, il m'en fallait bien plus que cela. J'observais la forme féminine qui se dessinait derrière la porte, sans parvenir à me remettre de ce qui venait de se passer. Finalement je décidais de saisir ma chance de m'échapper et ouvrit la porte à mon tour. Je me retrouvais alors derrière Isis, qui sous le coup de la colère, avait sorti un paquet de cigarette et s'en grillait une. Je la regardais un instant avant de lui enlever la cigarette des mains sans même savoir pourquoi. Mon corps agissaient contre ma volonté. « Depuis quand tu fumes, Eden tu tuerait si elle savait ça. T'as pas eu le droit au speech sur le cancer et blabla ? ». Et je portais la cigarette à mes lèvres pour en tirer une longue bouffée. « Je t'arrêtes tout de suite, je ne rentre pas dans la liste, moi, je suis déjà mort une fois, je ne suis plus à ça prêt. ». Et voilà que je me mettais à me dévoiler comme un abruti. Putain pourquoi j'avais dis ça. Maintenant, elle n'allait pas me lâcher, elle voudrait connaître le sous entendu que cachait cette phrase. Bordel ce que je pouvais être con quand je m'y mettais. Tirant une nouvelle bouffée de nicotine, je regardais la pluie tomber inlassablement sur la ville.

Isis avait fuit. En dépit, de sa détermination a percer mon secret, elle avait laissé sa colère explosée contre moi. Elle avait toutes les raisons de le faire, je jouais parfaitement le rôle du con de première avec elle. C'était tout simplement plus fort que moi, je pouvais pas supporter de rencontrer une autre femme de la même manière qu'Elyne, je n'acceptais pas qu'elle s'entende tout aussi bien qu'elle avec mes amis, je ne pouvais pas accepter qu'elle était plutôt mignonne, ni même qu'elle ne me laissait pas indifférent. Non tout cela m'était impossible. Elyne était et resterait la seule et unique femme de ma vie, celle que j'avais aimé et que je continuerais d'aimer indéfiniment. Elle était mon cœur, mon âme et elle le resterait jusqu'à la toute fin. Ma peine, ma douleur de l'avoir perdu définitivement était encore la seule chose qui me rattachait à elle et il était hors de question que je laissais ma peine s'envoler au profit d'autres sentiments, je ne pouvais pas la trahir, quand bien même elle n'était plus à mes cotés.
Spontanément, j'avais rejoint la brune à l'extérieur. En réalité, je m’apprêtais à quitter ce bar miteux pour aller passer un savon mémorable à Eden. Celle ci ne perdait vraiment rien pour attendre, et je commençais sérieusement à en avoir marre de son petit jeu de manipulation. Il y avait des limites et elle avait atteint celle de ma patience. Pourtant alors que mon esprit m'ordonnait de partir sur le champs, mon corps lui ne suivit pas le mouvement. Je m'étais arrêté à sa hauteur, surpris de la voir dégainer un paquet de cigarette et de s'en griller une. Ca lui ressemblait tellement pas. Mais après tout qu'est ce que j'en savais, j'avais jamais cherché à la connaître. Je le voulais pas alors, pourquoi je m'étais arrêté merde ?

J'avais l'impression de plus contrôler le moindre de mes faits et gestes et ça m'agaçait sérieusement. Sans savoir pourquoi, j'avais décidé de rester là comme un idiot à coté d'elle. J'avais pris sa cigarette de ses mains pour la porter à mes lèvres, lui rappelant l'habituel serment d'Eden sur la clope. Son regard surpris me fit lever les yeux au ciel, putain pourquoi je restais ? J'avais la chance de pouvoir partir sans me faire harceler de question et voilà que non seulement je ne bougeais pas et qu'en plus, je me mettais presque à lui faire des confidences.... Ca craignait grave. « Eden le fait à tous le monde ce serment. » . Pas faux, depuis que je connaissais la tête blonde, elle avait toujours eut un avis très tranché sur la clope et elle sermonnait quiconque en fumait devant elle. J'avais pris l'habitude de passer au dessus de tout ça, Eden avait d'autres raisons de m'agacer en ce moment que celle ci.
Je tirais plusieurs bouffées de nicotine. C'était dingue comme ce ridicule petit machin pouvait me faire du bien et me détendre. Cela me tuerait aussi certainement un jour, mais comme je l'avais dit un peu plutôt j'étais après tout déjà mort depuis trois ans. « Mort une fois ? C'est drôle.. Moi aussi je suis morte il y a six ans. » . Je levais un regard à la fois surpris et interrogateur sur elle. C'était pas possible, elle ne pouvait pas avoir perdu son mari ou son mec elle aussi. J'y croyais pas, sa douleur était la même et pourtant quelque chose me poussait à croire qu'elle était différente sur le fond. Six ans... Bordel. Comment je serai après six années sans Elyne ? Déjà qu'au bout de trois, je ne parvenais pas à me relever.... Je n'osais pas imaginer la suite.

Finalement peut être qu'Isis n'était pas si différente de moi que ce que je croyais. Cette révélation inattendue me fit pendant un instant, revisiter mon jugement. Jusqu'à ce qu'elle pose la question que je redoutais. « Tu as eu un accident ? Pourquoi tu dis que tu es "mort une fois'' ? » . Je soupirais, ne voulant clairement pas aborder le sujet. Et pourtant c'était moi qui avait balancé ça sur le tapis le premier. Quel abruti. J'aurai mieux fait de me casser comme un lâche, à présent j'étais coincé et je n'avais d'autre choix que de lui parler de mon passé. Je finissais la cigarette que j'avais chipé à Isis avant de lui répondre, histoire de me donner un peu de courage. Écrasant le mégot sous mon pied, je repris. « C'était il y a trois ans. C'est pas moi qui ais eu l'accident, c'est celle qui devait devenir ma femme. Elle est morte sur le coup. ». J'avais tout débité d'un coup, parlant d'un ton qui se voulait neutre mais qui était loin de l'être. L'évocation de la perte d'Elyne était toujours extrêmement douloureuse pour moi. Je n'avais jamais mis la main sur la personne qui avait percuté sa voiture et c'était peut être ça qui me bouffait autant... M'accoudant sur le mur à coté de moi, je l'observais un instant. « Et toi alors t'as perdu qui ? ». Quitte à entrer sur les confidences autant qu'elle se mette à table elle aussi.

La situation prenait vraiment une tournure étrange... Je ne m'étais clairement pas attendue à un tel revirement surtout en compagnie d'Isis... Habituellement, je l'ignorais, la cassait dès que j'en avais l'occasion, en bref, je me comportais comme une véritable connard avec dès que je le pouvais. Et voilà qu'à présent, on se retrouvait tout les deux sous le porche de ce bar pourri à parler de choses plutôt personnelle.
La perte d'un être cher nous marque tous à vie, c'était une évidence. Et quand bien même cette cicatrice se rouvre à chaque instant de notre vie, il était étrange de remarquer avec quelle facilité on pouvait la cacher à de parfaits inconnus. C'est ainsi que je n'avais pas remarqué qu'Isis et moi partagions au moins un point commun et pas des moindres... Je n'avais à vrai dire jamais cherché à savoir ce qu'elle cachait puisque j'avais jamais voulu apprendre à la connaître. Et voilà quand un rien de temps avec une dispute et une cigarette on en arrivait à aborder les sujets les plus intimes de notre vie.

Je venais de lui dévoiler pourquoi j'étais devenu un homme fermé, réservé, distant, voir même froid par moment. Derrière cette carapace que je m'étais  forgé au cours de ces trois dernières années, il y avait le souvenir de la perte d'Elyne. J'avais tout imaginé avec elle un futur, une belle maison, des enfants, et on me l'avait arraché si rapidement que la plaie béante que cela avait laissé en moi, ne s'était jamais refermée. Tout les jours, il y avait un petit détail qui me rappelait sa façon d'être ou bien ce qu'elle aimait et tout les jours, je me raccrochais à cela pour pouvoir continuer à vivre malgré tout. Le pire de tous ces détails avaient certainement été mon accrochage avec Isis, puisque j'avais pour la première fois rencontré Isis de la même façon.... Et peut être qu'au fond, c'était juste cela qui m'avait empêché d'apprendre à la connaître. Parce que cela me rappelait trop Elyne... « Oh.. Je ne savais pas.. je suis désolée Nolan, j'aurais pas du poser toutes ses questions excuse moi ça ne me regardais pas..  » . Boarf, c'était trop maintenant, fallait y penser avant. De toute façon, c'était toujours comme ça, les gens se montraient trop curieux et une fois qu'ils finissaient par apprendre l'horrible vérité, ils se confondaient en excuses, et parfois, ils fuyaient lâchement comme par peur d'être contaminé par la mort à leur tour.

Je soupirais, ne préférant pas relever sa remarque cette fois, avant de lui retourner la question, ses paroles avaient laissé croire qu'elle aussi avait perdu quelqu'un a qui elle tenait vraiment et maintenant que je mettais m'y à table, pourquoi n'en ferait-elle pas autant ? Son regard passa alors de moi à son poignet qu'elle effleura doucement avant de reprendre. « Il s'appelait Seth, c'était mon petit frère.. Enfin non, c'était mon jumeau plus exactement, l'autre moitié de moi si tu préfère.  » . Les mots qu'elle utilisait n'était pas employé au hasard et je pouvais en un sens tenter de me mettre à sa place. Son frère jumeau... c'était un peu comme si je devais perdre Peter un jour... Si jamais cela arrivait je finirai au fond du trou, et cette fois pas sur que je m'en relève. « Mais moi c'était prévu, je devais m'y attendre, m'y préparer durant toute ma vie. Il était atteint de mucoviscidose, l'espérance de vie était de vingt ans, on le savais... Il est parti quand nous avions dix sept ans. » . Si jeune... La mort frappait parfois tellement vite. C'était injuste. « Prévu ou pas, c'est sans doute toujours aussi difficile à accepter. », finissais je par lâcher en guise de simple constatation. Je n'attendais pas de réponse, je savais qu'elle partageait la même opinion que moi sur le sujet. Relevant son chemisier pour dévoiler son poignet, elle me montra alors ce qui semblait être un tatouage. « Tu vois ce « S » ? C'est tout simplement pour lui. Je l'ai en quelque sorte toujours avec moi. » . Sa phrase réussit à m'arracher un sourire. J'avais moi même pensé à me faire tatouer pour qu'une part de ma femme reste éternellement avec moi, mais j'avais finalement réalisé que ce n'était pas nécessaire. J'avais toujours eu Elyne dans la peau, avec ou sans encre noire. Elle ne me quitterait jamais. « Cette fois tu permet que je fume une cigarette ? » . Je relevais le regard vers elle avant de hocher la tête. Derrière sa gueule d'ange, ses longs cheveux bruns et ses yeux verts émeraudes, elle cachait un profond mal être... Je n'aurai pas cru qu'elle avait un tel passé. Je m'étais arrêté à notre première rencontre sur le fait qu'elle conduise en téléphonant et sur son apparence physique. Pour moi, elle avait été une fille de bourge trop bien élevé qui prenait le monde de haut et qui se foutait pas mal de foutre le bordel autour d'elle.. Ma colère m'avait grandement aveuglé à ce qu'on dirait.

Accoudé au mur du bar, je la regardais sortir à nouveau son paquet de clope pour s'en griller une. Ses mains étaient tremblantes probablement à cause de ses dernières confidences qui avaient du lui rappeler pas mal de mauvais souvenirs. La mucoviscidose était une terrible maladie et voir son frère jumeau sombrer petit à petit n'avait pas du être simple pour elle. « Je suis désolé que tu ais du supporter le perte de ton frère... et désolée de me comporter comme un parfait idiot avec moi... c'est.. c'est juste plus fort que moi. ». J'hésitais à poursuivre mes explications... D'un coté, je lui devais quand même au moins ça, de l'autre... J'avais pas franchement envie de continuer à m'étaler. C'était pas mon genre.. Pas du tout mon genre. « Le truc, tu vois c'est que tu m'a foncé dedans ce jour là et... c'est comme ça que j'ai rencontré Elyne la première fois. C'est bête, mais je t'en ai voulu pour ça. ». Voilà que je continuais sur ma lancée à présent. Eden n'avait pas intérêt à découvrir ça, sans quoi elle allait me bassiner pendant des heures, sur le fait « que c'est trop super, tu t'ouvres enfin blablabla », sans oublier que « Isis elle est trop géniaal en plus !! ». Rien qu'à imaginer la situation, j'en avais déjà marre. « Je t'offre un café pour me faire pardonner ? »